Publié il y a 5 ans
Thématique Succession

Question:

Quelles sont les conditions d'application de la représentation, en droit congolais, tant sur le plan civil que sur le plan fiscal ?

Réponse:

Bonjour

La représentation est une action consistant pour une personne investie à cet effet d’un pouvoir légal, judiciaire ou conventionnel (le représentant), d’accomplir au nom et pour le compte d’une autre incapable ou empêché (le représenté), un acte juridique dont les effets se produisent directement sur la tête du représenter. Il s’agit d’un mandat, d’une procuration, d’un administrateur, d’une gestion d’affaire (Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, 10èm éd mise à jour, PUF, Paris, 2014, p. 903).

 

Il s’agit du mécanisme même par la vertu duquel l’acte accompli par le représentant engendre des droits et des obligations non pour ce dernier (partie agissante), mais pour le représenter (partie intéressée), de telle sorte que celui-ci devient directement créancier ou débiteur du tiers avec lequel le représentant a traité (ans lui-même s’engager), on dit que la représentation est une fiction (Gérard CORNU, Op.cit., p.903).

 

1. SUR LE PLAN CIVIL

 

La représentation est régie par le décret du 30 juillet 1888 relatif aux contrats ou obligations conventionnelles, communément appelé code civil congolais livre III (CCCLIII). En effet, l’article 526 du décret précité prévoit que « le mandat ou procuration est un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom ». Il s’agit d’un contrat qui ne se forme que par l’acceptation du mandataire.

 

Le mandat peut être donné, ou par acte authentique, ou par écrit sous seing privé, même par lettre (article 527 du décret précité).

 

Par ailleurs, d’une manière générale, la représentation en matière civil peut se concevoir en trois facettes, à savoir : la représentation extrajudiciaire, la représentation judiciaire et la représentation des mineurs.

 

  • la représentation extrajudiciaire peut être reconnue à toute personne ayant atteint l’âge de la majorité (18 ans) et dont les facultés mentales ne sont pas durablement altérées ;

 

  • la représentation judiciaire : celle-ci consiste à avoir un mandat ou pouvoir d’agir en justice au nom et pour le compte d’une autre personne. En effet, il s’agit d’une fonction d’origine variable consistant pour une personne à agir en justice au nom d’une autre comme demandeur ou défendeur, les effets juridiques de l’instance se produisant au profit ou à la charge de cette dernière. C’est exactement une mission d’origine conventionnelle (mandat ad litem) qui confère au mandataire pouvoir et devoir d’accomplir au nom du mandant (plaideur) les actes de la procédure et emporte, sauf dispositions conventions contraires, mission d’assistance (G. CORNU, Op.cit., p.903). 

Pour cette représentation (judiciaire), l’ORDONNANCE-LOI n°79-028 du 28 septembre 1979 portant organisation du barreau, du corps des défenseurs judiciaires  et du corps des mandataires de l’État, reconnait ce monopole de la représentation devant les cours et tribunaux, voire même les parques aux  seuls avocats et défenseurs judiciaires. 

Aux termes de l’article 1èr de l’ordonnance ci-dessus, les avocats sont des auxiliaires de justice chargés d’assister  ou représenter les parties, postuler, conclure et plaider devant  les juridictions.

En son article 125, l’ordonnance sous examen prévoit que les défenseurs judiciaires sont des auxiliaires de justice, chargés d’assister ou représenter les parties, postuler, conclure et plaider devant les tribunaux de paix et les tribunaux de grande instance.

  • La représentation des incapables 

En principe « toute personne capable peut exercer ses droits civils conformément à la loi ou à la coutume sauf les exceptions établies par la loi » (article 212 code de la famille). Ces dernières sont nommément appelées : incapacités juridiques.

 

Par conséquent, l’incapacité se définie comme l’état d’une personne privée par la loi de la jouissance ou de l’exercice des certaines droits. En d’autres termes : « une incapacité est une restriction générale ou spéciale, apporté à l’aptitude des individus à posséder ou à exercer les droits reconnus à la personne » (lire les incapacités juridiques, in www.universalis.fr/encyclopédie; page consultée le 06 mars 2013).

 

L’article 215 du code de la famille (loi n°16/008 du 15 juillet 2016 modifiant la loi n°87-010 du 1èr août 1987) combiné avec les argumentaires du Professeur Eddy MWANZO Idin’Aminye (Cours de droit civil les personnes, G1 Droit, Université de Mbandaka 2015-2016, p.163), énumèrent les incapables juridiques, il s’agit du mineur, des majeurs aliénés interdits et les majeurs faibles d’esprit, prodigues, affaiblies par l’âge ou infirmes placés sous curatelle. Seuls les mineurs sont soumis dans un régime de représentation, par contre les autres incapables sont soumis au régime d’assistance (qui ne fait pas l’objet de notre réponse).

 

Pour ainsi dire que, un mineur selon l’article 2 point 2 de loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant  protection de l'enfant (J.O. 12.01.2009), est définit comme : « toute personne âgée de moins de 18 ans ». Cette personne étant incapable, est soumise au régime de la représentation, c’est-à-dire elle-même ne peut poser les actes juridiques, mais ceux-ci sont accomplis en son nom et pour son compte via son père, mère, tuteur, etc…

Notons en passant que, le mineur n’a pas besoin de la représentation si et seulement si il est émancipé conformément aux articles 288 et suivants.

 

Pour le Professeur Jean CORBONIER, « la représentation est un remède spécifique des incapacités le plus profonde et aurait comme mécanisme technique de protection : la tutelle » (J. CARBONIER, Droit civil la famille, les incapacités, P.U.F., Paris, 1955, p.123.). Il conviendrait de signaler que, ce régime consiste à ce que l’incapacité ne figure pas en personne sur la scène juridique, il n’émet pas sa volonté et ne s’engage.

 

Faisons aussi la distinction entre la représentation d’une personne physique et d’une personne morale.

La première est accordée directement à une autre personne par le titulaire du droit. Par contre, la représentation de la personne morale (société, entreprise public, institutions publiques, ONG, ASBL..) ne peut se faire que conformément aux statuts ou procès-verbaux des assemblées des associés. En d’autres mots, une personne morale est représentée par la personne que les statuts donnent ce pouvoir (le gérant social). Et celui-ci, lorsqu’il s’agit d’une action en justice, étant donné que les avocats et défenseurs judiciaires ont le monopole de représentation, doit donner mandat à un avocat pour agir au nom et pour le compte de la société.

Jurisprudence : 

  • Il a été jugé que, une personne morale ne peut agir en justice que par son représentant qualifié. Cette qualité doit résulter des statuts ou des pièces officielles produits aux débats ou publiés au journal officiel (CSJ, RP 87, 11/4/1973, In Bulletin des arrêts, 1974, p.103).
  • Il est de jurisprudence et doctrines abondantes que pour prouver la qualité de son représentant en justice, la CSJ exige que la personne morale publique produise au dossier la loi ou le règlement qui l’a créé et l’organise (CSJ, 13/06/1979, in Bulletin des arrêts, n°3, p.236, cité par Maitre Ruffin LUKOO, la jurisprudence congolaise en procédure civile, éd. OSS, Kinshasa, 2010, p.319).

II. SUR LE PLAN FISCAL

Un représentant fiscal est une personne désignée par le contribuable (personne physique ou morale)

Sur le plan fiscal, la représentation peut se faire en deux niveau : soit un représentant (du vivant du redevable), soit un représentant en cas de décès du recevable). 

  • Représentant du vivant du redevable : Le code des impôts reconnait le pouvoir qu’a un contribuable de déléguer ses pouvoirs à une tierce personne (avocat, conseiller fiscal, comptable, conseiller juridique, cabinet fiduciaire, etc…) pour agir en son et pour son compte, notamment pour déclarer l’impôt, payer l’impôt, voire même faire des réclamations de paiement ou autre.

 

Le contribuable doit donner au représentant un mandat général (lui représentant à tout moment) ou un mandat spécial (lui représentant pour un cas spécifique), et ce, par voie de procuration spéciale ou permanente.

L’article 98 al.1 de l’Ordonnance-Loi n°69-006 du 10 février 1969 modifiée telle que modifié à ce jour, prévoit que « la déclaration doit être souscrite sur un formulaire adressé au redevable par le Vérificateur des impôts. Ce formulaire doit être rempli, daté, signé par le redevable et contresigné  par  son conseil  et  son comptable  puis  être renvoyé  par  le redevable  à  la Direction Générale  des  Impôts. Les déclarations peuvent aussi être souscrites par un mandataire qui doit alors justifier du mandat général ou spécial en vertu duquel il agit.

L’article de la loi sus-évoqué prévoit que les  redevables  ainsique  les  mandataires qui  justifient  d’unmandat  général  ou spécial en vertu duquel ils agissent, peuvent se pourvoir par écrit en réclamation contre le montant de leur imposition auprès du Directeur Général des Impôts ou du Directeur Provincial compétent.

 

L’article 3 al.1 de la loi  n°004/2003du  13  mars2003  portant  réforme des procédures fiscales dispose que les déclarations, dûment remplies, datées et signées par les redevables ou leurs représentants, sont déposées auprès des services compétents de l’Administration des impôts. 

 

L’article 104 de cette loi prescrit aussi que les  redevables  ainsique  leurs  mandataires qui  justifient d’un  mandat général  ou spécial  en  vertu duquel  ils  agissent,peuvent  se  pourvoir par  écrit  en réclamation  contre le  montant  de leur  imposition  auprès du  Directeur  des impôts compétent…

 

  • Représentant en cas du décès du recevable

 

En cas du décès de redevable, ces sont ces héritiers qui lui substituent par rapport aux obligations fiscales conformément à l’article 756 de la loi n°16/008 du 15 juillet 2016 modifiant la loi n°87-010 du 1ère août 1987portant code du travail qui dispose que « les droits et obligations du du dejus constituant l’hérédité passent à ses héritiers et légataires conformément aux dispositions du présent titre, hormis le cas où ils sont éteints par le décès du de cujus ».

 

Pour ainsi dire que, la succession d’une personne reprend tous les biens (actif) qu’il a laissés ainsi que toutes les créances ou dettes (obligations, devoirs, passif).

Sue le plan juridique, les dettes fiscales constituent des créances du trésor public, et les héritiers ou légataire d’une personne précédée sont d’officie les redevables en remplacement (représentant du défunt).

 

Dans son article 798 point 4, le code de la famille dit que dans le règlement des charges de la succession (obligations, créances, dettes fiscales), le liquidateur doit respecter l’ordre suivant : ….en quatrième lieu, les dettes du de dejus pour lesquelles il fera les recherches et avis publics qui s’imposent et dinguera les dettes exigibles de celles qui ne le sont pas.

 

Pour ainsi dire que, les successibles (héritiers ou légataires) sont d’office représentants de la personne précédée, et cela a des conséquences sur les dettes fiscales dues au trésor public.

 

D’ailleurs, l’article 119  de l’ordonnance-loi n°69/009 du 10 février 1969 telle que modifiée à ce jour prévôt que, sont assimilés au même redevable : a) ses héritiers ; b) son conjoint ; etc…

L’article 98 al.2 de l’ordonnance-Loi n°69-006 du 10 février 1969 modifiée telle que modifié à ce jour, prévoit que quant  à la  déclaration  des contribuables  décédés  sans avoir  rempli  cette formalité, elle doit être souscrite par les héritiers, légataires et donataires universels ou par leur mandataire.

L’article 3 al.1 de la loi  n°004/2003du  13  mars 2003  portant  réforme des procédures fiscales dispose qu’en cas de décès du redevable, les déclarations doivent être souscrites par ses héritiers, légataires et donataires universels ou par leurs mandataires.

 

Maitre MBOKOLO ELIMA Edmond

Avocat au Barreau près la Cour d’Appel de l’Equateur

Mbandaka

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